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Le problème récurrent de la pénurie d’interprètes auprès de la police et de la Justice.

Questions parlementaires orales jointes de :
– Stefaan Van Hecke à Vincent Van Quickenborne (VPM Justice et Mer du Nord) sur « La pénurie d’interprètes et de traducteurs auprès de la police et de la Justice » (55032078C)
– Marijke Dillen à Vincent Van Quickenborne (VPM Justice et Mer du Nord) sur « Le problème récurrent de la pénurie d’interprètes auprès de la Justice » (55032211C)
(La Chambre des Représentants de Belgique, Commission de la Justice du 07-12-2022)

 

La présidente : M. Van Hecke est excusé.

[reproduction de la question posée par Stefaan Van Hecke (Groen)] :

Monsieur le ministre, il y a toujours un grand besoin de traducteurs et d’interprètes dans les affaires pénales. Ces derniers jours, plusieurs articles sont parus et indiquent une fois de plus comment cette pénurie entrave le bon fonctionnement de la justice. La semaine dernière, une affaire à Roulers a dû être reportée en raison du manque d’interprètes (Het Laatste Nieuws, 15 novembre). La police et le parquet d’Anvers ont même du mal à trouver des interprètes pour le français et l’anglais (Het Laatste Nieuws et Het Belang Van Limburg, 12 novembre). Le Conseil supérieur de la Justice, dans son mémorandum de 2019, a déjà mentionné le retard pris par de nombreuses affaires judiciaires en raison du manque d’interprètes et a confirmé la nécessité d’une rémunération adéquate et d’une gestion performante et d’un affinement des Registres nationaux des experts judiciaires.

Selon l’Union Professionnelle des Traducteurs et Interprètes Jurés, en raison de la faible rémunération, nombre de leurs membres n’exercent le métier d’interprète judiciaire qu’à titre secondaire, en raison de la faible rémunération en général, de la rémunération à la minute et de l’imprévisibilité de la durée du travail et donc du temps effectué, de la faible indemnisation en cas de mission annulée… L’UPTIJ suggère d’augmenter le tarif horaire et de payer un interprète au moins pour un bloc de 3 heures à chaque fois, mais vous dites que cela ne serait pas budgétairement possible. Il est important de rémunérer correctement les experts, les interprètes et les traducteurs pour attirer les personnes qui fournissent des prestations de qualité.

À cet égard, j’ai les questions suivantes à vous poser :

Quelles mesures allez-vous prendre pour répondre au besoin urgent de traducteurs et d’interprètes ?

Quelles mesures allez-vous prendre pour faire face au besoin structurel de traducteurs et d’interprètes ?

Êtes-vous prêt à rendre la rémunération des traducteurs et des interprètes plus conforme au marché ?

 

07.01 Marijke Dillen (VB) : Monsieur le ministre, une fois de plus, en raison de la pénurie importante d’interprètes et de traducteurs – un problème de longue date – un mégaprocès lié au trafic de drogue devant le tribunal correctionnel a de nouveau dû être reporté. Nous savons tous que c’est une vieille douleur. En 2014, on pouvait lire des gros titres comme « La pénurie d’interprètes tourmente les tribunaux ». Aujourd’hui n’est pas différent. Même le Conseil supérieur de la Justice a déjà indiqué que cette pénurie importante risquait de retarder les procédures judiciaires.

Plusieurs années se sont écoulées depuis, et le problème n’a pas été résolu, monsieur le ministre. Elle reste aiguë, tant au niveau de la magistrature du siège que du parquet, tant au niveau des juges d’instruction que de la police, à en juger par la pratique quotidienne.

La rémunération pour ces missions est beaucoup trop faible, cela a été mentionné il y a un instant. Il faut revoir le tarif de nuit. Des modifications doivent être apportées à la compensation en cas d’annulation, et ainsi de suite. En d’autres termes, je pense que nous devons nous atteler d’urgence à un nouveau et meilleur statut des traducteurs et des interprètes afin d’apporter une réponse définitive aux problèmes existants.

Or, dès le 20 mai de cette année, l’Union Professionnelle des Traducteurs et Interprètes Jurés vous a remis une liste de revendications, parmi lesquelles la demande d’être rémunéré correctement. En cas d’annulation, il faudrait prévoir une prestation horaire plutôt qu’une prestation d’attente, pour laquelle la rémunération est moindre. Ils attendent également une véritable réévaluation depuis des années.

Apparemment, il y aura une indexation en janvier. Je me permets de vous signaler que cette indexation automatique, qui sera annoncée par une circulaire en janvier 2023, n’implique pas réellement une augmentation de la rémunération, mais uniquement l’indexation légale obligatoire.

Cependant, selon les informations, la Justice n’envisagerait que quelques ajustements mineurs à l’arrêté royal tarifaire de décembre 2016.

J’ai donc quelques questions à poser. Quelle est votre position par rapport à la liste de revendications qui vous a été envoyée par l’association professionnelle en mai ? Allez-vous prendre des initiatives structurelles à court terme pour œuvrer à une vraie revalorisation, afin d’éliminer ainsi la pénurie d’interprètes ?

 

07.02 Ministre Vincent Van Quickenborne (en néerlandais) : Madame la présidente, je vais répondre aux questions des deux membres telles qu’elles ont été soumises, car il m’est difficile de séparer les réponses.

Je voudrais tout d’abord ajouter quelque chose au sujet de l’affaire à Roulers à laquelle M. Van Hecke a fait référence. Il s’agit en effet d’une grande affaire de drogue avec 12 prévenus, liée à l’importation d’opium dans la région de Roulers. L’affaire elle-même a été portée devant le tribunal de première instance de Courtrai.

Selon les informations fournies à mes services, l’affaire a nécessité un interprète pendjabi et un interprète farsi. L’interprète farsi initialement désigné l’a déjà été à la fin du mois de juin 2022. Il a informé début novembre qu’il ne pourrait pas être présent. Le greffe a cherché un nouvel interprète début novembre, mais celui-ci a lui aussi décliné l’offre le 10 novembre en raison d’une double réservation. Ils ont réquisitionné à la hâte un nouvel interprète farsi, mais celui-ci ne s’est pas présenté à l’audience.

Une demi-heure avant le début de la session, l’interprète pendjabi a envoyé un SMS disant que son enfant était malade et qu’il allait contacter un collègue. Malheureusement, ce collègue était également occupé, de sorte qu’il y avait deux interprètes absents au début de l’audience. Il me semble qu’il s’agit d’un malheureux concours de circonstances plutôt que d’un manque systématique d’interprètes. Le greffe n’est pas non plus à blâmer dans cette affaire, car il avait déjà prévenu les interprètes des mois à l’avance, comme il se doit pour une bonne gestion de session.

Ces prochaines années, nous poursuivrons l’élaboration de Just Court, une application permettant d’assurer une gestion et une organisation numériques des audiences. En effet, il est important que l’interprète soit convoqué à la bonne heure et ne doive donc pas attendre des heures au Palais de Justice – rappelez-vous la discussion que nous avions eue lors de l’examen de ma note de politique générale. C’est un problème qui se pose déjà depuis des décennies à la Justice.

Enfin, depuis mars 2022, tout le monde peut rechercher des interprètes via JustOnWeb, la base de données numérique. Je viens de vérifier et dans notre base de données à la mi-novembre, il y avait 14 interprètes néerlandais-pendjabi et 23 interprètes néerlandais-farsi.

En ce qui concerne la politique que je mène en matière d’interprètes, je vous renvoie aux propos que j’ai tenus à l’instant en réponse à une question de Mme De Wit.

 

07.03 Marijke Dillen (VB) : Madame la présidente, il aurait été préférable de regrouper ces trois questions.

La présidente : Les titres étaient différents et, sur cette base, nous ne pouvions pas constater qu’elles allaient ensemble.

07.04 Marijke Dillen (VB) : Ce n’est évidemment pas un reproche que j’adresse à vous ou aux services, mais cela aurait été plus logique.

Monsieur le ministre, j’ai entendu la réponse que vous avez donnée à Mme De Wit.

Sauf erreur de ma part, les aspects financiers de l’indexation et les exigences de l’association professionnelle n’ont pas vraiment été abordés. Vous n’avez pas répondu à cette question, à moins que cela n’ait échappé à mon attention. Je pense qu’il y a un point de friction, après tout. Bien sûr, il faut indexer, mais l’indexation n’est pas une augmentation de la rémunération. Il s’agit simplement d’un ajustement à l’augmentation des frais due à l’inflation.

Monsieur le ministre, j’espère que vous serez prêt à examiner de près le paquet de revendications que l’association professionnelle vous a remis et à entamer des discussions avec elle pour voir comment les choses peuvent être concrétisées.

L’incident est clos.

 
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